Espaces de normativité (2014-2018)
Il serait réducteur de ne parler de normativité qu’en termes de droit, à travers le jeu entre normes juridiques, jurisprudences et enseignements théoriques. L’espace des juristes n’est pas le seul, ni même forcément le plus déterminant pour traiter de la normativité. Dans un sens plus général, la normativité sort l’homme de son état d’être, pour en faire un devoir-être. C’est dans ce sens du devoir-être que nous abordons la normativité entre vouloir, devoir et pouvoir, entre volontarisme et obligation.
Nous l’explorons à travers quatre fenêtres : croyances ; justices ; pouvoir disciplinaire et pratiques pénales ; science(s).
Les espaces normatifs sont ainsi saisis dans leur historicité et leur contemporanéité – du Moyen Âge à nos jours –, dans leurs aspects théoriques, pratiques et discursifs à travers quatre chantiers qui associent sociologie, philosophie, histoire et droit.
Croyances
Il s’agit ici d’investir la question de la normativité dans une société du croire, à partir du cas des jansénistes dans l’Europe du 18e siècle et de leurs organes de presse (J. Guilbaud, en coopération avec des collègues de l’université Paris Ouest).
Justices
Ce deuxième chantier part de l’ordre du droit et du juriste comme centre de gravité de toute activité juridique (R. M. Kiesow). Ses terrains d’enquête portent plus particulièrement sur la diversité juridique, les lectures juridiques de la littérature (avec Olivier Cayla, EHESS) et l’arsenal du juriste (avec Florence Bellivier, université Paris Ouest)
Pratiques pénales
Ce thème se nourrit de recherches sur les pratiques pénales à l’époque moderne, la prison ou le bannissement (F. Bretschneider), de même que de travaux menés sur le pouvoir disciplinaire à partir d’une étude de cas sur la censure de la culture à Vienne au tournant du 19e siècle (J. Le Rider).
Il s’appuie notamment sur un projet collectif dédié à une histoire comparée des enfermements monastiques et carcéraux du Moyen Âge à l’époque contemporaine (F. Bretschneider, avec des collègues de l’université de Champagne-Ardenne, du LAMOP/Paris I et de l’université Paris Ouest).
Science(s)
Ce dernier chantier traite du rôle et de la place des hommes de sciences dans la cité à partir de différentes perspectives : des activités de la fondation Rockefeller en Europe (projet SOPHIE, M. Werner et L. Tournès) jusqu’au rôle d’une expertise à prétention savante dans la production des normes européennes (S. Laurens). Il héberge également le projet d’un Dictionnaire historique du droit et des pratiques judiciaires (F. Bretschneider et R. M. Kiesow).
Croyances, justices, pratiques pénales et science(s). Au-delà d’une quelconque exhaustivité, toujours inaccessible, se déploie dans ces champs une réflexion commune sur la normativité, qui échappe au raisonnement purement juridique ou moral. La normativité exerce son pouvoir silencieux, dans les réponses à quatre questions : comment faut-il croire ? Comment faut-il juger ? Comment faut-il chercher ? Et comment éprouve-t-on le « il faut » (aller en prison, par exemple) auquel on est exposé ? « Faut-il ?», « comment faut-il ? », voilà les questions que nous pose la normativité.